PERTE D’ENSOLEILLEMENT ET TROUBLE ANORMAL DE VOISINAGE

Vous pouvez construire en limite de propriété ou avec un recul sur votre terrain ?

 Prêtez une attention particulière à l’impact de cet emplacement en termes d’ensoleillement pour vos voisins sous peine de vous voir obliger de les indemniser, même si votre permis de construire autorise une implantation en limite de propriété

 – EN BREF –

 Le choix d’une implantation de la construction en limite de propriété, sur une parcelle disposant d’une grande superficie, participe à la caractérisation du trouble anormal de voisinage pour perte d’ensoleillement

 – POUR ALLER PLUS LOIN –

“Nul ne doit causer à autrui un trouble de voisinage” (Cass. 2e civ., 19 nov. 1986 : Bull. civ. 1986, II, n° 172).

La Cour d’Appel de Colmar rappelle les contours de cette responsabilité, en matière de perte d’ensoleillement, dans un arrêt particulièrement pédagogique dont des extraits sont cités ci-après (Cour d’appel de Colmar, Chambre 2 A, 1er décembre 2022, n° 20/02984).

« Responsabilité sans faute » signifie que le respect ou non du permis de construire est sans incidence sur la caractérisation d’un trouble anormal de voisinage :

« l’existence d’une infraction à une disposition administrative ne constitue pas en soi un trouble anormal du voisinage, tout comme d’ailleurs le respect des dispositions légales n’exclut pas la possibilité d’un tel trouble. » (voir également pour le cas du respect des dispositions légales et d’un trouble caractérisé – CA Grenoble, 1re ch., 24 avr. 2007 : JurisData n° 2007-335619).

Seule la caractérisation factuelle d’une réelle perte d’ensoleillement, plusieurs heures par jour, plusieurs mois dans l’année permet de retenir le trouble anormal de voisinage :

« Il y a donc lieu de constater que cette perte d’ensoleillement est particulièrement importante, en ce qu’elle touche des pièces de vie que sont la cuisine et le salon, pendant deux ou trois saisons et pendant plusieurs heures du matin. Le trouble doit être considéré comme anormal, en ce qu’il prive durant au moins la moitié de l’année, voire les trois quarts, les occupants de la maison de soleil direct durant les heures matinales de 8 à 11 h, voir parfois 13 h »

L’appréciation in concreto (CA Aix-en-Provence, 4e ch. B, 15 oct. 1996 : JurisData n° 1996-046364) en fonction des circonstances de lieu (CA Paris, 2e ch. B, 27 mars 1997 : JurisData n° 1997-020969), permet au juge de retenir d’autant plus cette anormalité lorsque d’autres possibilités d’implantation, moins génératrices de perte d’ensoleillement, étaient envisageables.

Les juges de la Cour d’Appel de Colmar complètent ici leur raisonnement :

« En outre, il ressort des photographies et des plans que les intimés ont fait le choix de positionner leur maison, de taille imposante, en limite de propriété alors que la superficie du terrain leur permettaient de laisser de l’espace entre la maison et la limite de leur terrain. Ils ne pouvaient ignorer que ce positionnement était le moins avantageux pour leurs voisins, et leur imposait une vue directe et rapprochée sur le mur aveugle de la maison en devenir. »

En l’espèce, même si les demandeurs avaient le droit de construire en limite de propriété selon leur permis de construire et le PLU, le choix de cette implantation a généré, en pratique, une perte d’ensoleillement réelle pour leurs voisins.

Ils ont été condamnés à leur régler la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts (même si la perte de la valeur vénale était limitée à 15.000 euros – Cour d’appel de colmar, Chambre 2 A, 1er décembre 2022, n° 20/0298).

Le cabinet pratique le contentieux des troubles anormaux de voisinage et vous assiste stratégiquement sur ce que vous devez faire.

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